top of page
Redécouvrir l’horreur avec Uzumaki
Pour la première fois, une oeuvre d’horreur arrive à me faire frissonner, à m’écoeurer et à me donner envie de regarder ailleurs. Ce manga est le premier manga d’horreur, même la première oeuvre dessinée d’horreur que j’ai eu l’occasion de lire et quelle surprise !
Je vais aujourd’hui vous parler de UZUMAKI, un manga de Junji Ito.

Le mangaka
C’est le premier manga de Junji Ito que j’ai lu. Cela sans connaître ni l’auteur ni le contenu du manga et quelle surprise ! J’ai donc dû me renseigner pour en savoir plus.

J’apprends ainsi que Junji Ito est un mangaka japonais né le 31 juillet 1963 et est père d’une bibliographie d’horreur reconnue mondialement. Il est en fait même une des principales influences de l’horreur japonais moderne. Rien d’étonnant donc que l’expérience Uzumaki ai été si éprouvante.

Le manga
UZUMAKI est en manga en trois tomes (20 chapitres) publiés entre 1998 et 1999 au Japon et en 2002 en France aux éditions Tonkam. On y suit Kirie Goshima et son petit-ami Shuishi Saito dans la petite ville de Kurouzu. A ses côtés nous découvrons que certains habitants commencent à être obsédés par la forme de spirale à commencer par le père de Shuishi.
La spirale c’est le coeur de l’intrigue du manga, c’est assez difficile à expliquer, mais la Spirale et à la fois physique et mentale. On peut la décrire comme une force qui va venir renverser l’équilibre du village en imposant ses propres règles physiques et psychiques.

Ainsi, au fur et à mesure, la spirale va envahir à la fois l’esprit des habitants, leurs corps mais aussi la ville, la nature, les éléments et les objets qui la constituent. La spirale va hanter tous et toutes choses, Homme, nature, objets, animaux etc. Nous vivons ces événements sous deux points de vue. Celui de Kirie et celui de Shuishi. La première est naïve face aux événements qui se déroulent sous ses yeux et ignorent le côté mystique de la spirale. De l’autre, Shuishi, lui est à l’opposé du spectre et devient méfiant, il va même jusqu'à vivre en autarcie pour s’éloigner le plus possible de la ville afin d’éviter tout contact avec la Spirale. Une spirale qu’il n’arrivera, bien sûr, jamais à éviter éternellement...

La narration : une nouvelle forme d’horreur
C’est dans la narration que réside la force du Manga. Celle-ci est faite de sorte à ce que l’on découvre en même temps que ces deux personnages, avec autant de naïveté que Kirie et autant d’horreur que Shuishi, petit à petit et phénomène après phénomène (un par chapitre généralement) l’étendu du pouvoir de “ la spirale ”. Tout comme marcher et vivre dans la ville de Kurouzu peut les exposer aux horreurs de la spirale, tourner la page c’est pour nous, inexorablement, prendre le risque de s’exposer à une forme d’horreur corporelle ou psychologique potentielle.
Avec UZUMAKI j’ai découvert une nouvelle forme d’horreur. Les films et autres formats d’horreur nous habituent au Jump Scare, aux monstres mythologiques ou encore aux petites filles aux cheveux qui tombent devant leurs visages. Ici l’horreur vient du concept très simple, presque anodin dans la vie courante, de la spirale. Elle vient s’emparer de tous les aspects de la vie. L’horreur est corporelle, les corps vont se déformer d’une manière totalement inhumaine et effrayante en forme de spirale. les habitants même normaux vont avoir des expressions transformées par l'obsession que crée la spirale, provoquant parfois des sensations de fort malaise. Même les parties les plus sacrées comme la naissance seront affectées affreusement par la spirale (je n’en dit pas plus, je vous laisse découvrir tout ça par vous même). On a également droit à des transformations complètes des habitants en d’autres formes vivantes et on assiste à tout le processus, encore une fois le corps est maltraité. L’horreur n’est plus ponctuel et prévisible mais omniprésent et oppressant. La spirale est partout. Dans toutes choses, comme les personnages nous n’avons aucune chance de pouvoir deviner sous quelle forme elle va se présenter.

La manipulation des concepts et constantes du monde
Le dessin vient très largement contribuer à la puissance de l’effet d’horreur. Le trait de Junji Ito est extrêmement précis et respecte toutes les proportions. Il est sublime, fin et arrive à montrer la beauté des personnages. C’est justement cette précision dans son trait qui lui permet ensuite de renverser la beauté qu’il donne aux choses, en les déformant pour révéler leurs faces horribles et renforcer ainsi le sentiment d’immersion et de peur. Il va par exemple mettre en avant les traits d’une jolie jeune femme souriante puis en faire la victime de châtiments corporels inimaginable.
C’est d’ailleurs sur ce principe qu’il déclare trouver les concepts pour ses mangas. Il prend des éléments positifs de la culture japonaise et les renversent.
J’ai, pour ma part, trouvé qu’il manipulait les constantes du monde tout comme Kafka dans la métamorphose. Il nous expose à la faiblesse de l’Homme face à un phénomène qu’il ne comprend pas et qui le dépasse. Les personnages font constamment face à une perte de leurs sens d’eux même soit à cause de leur peur, de leurs obsessions ou parce qu’ils sont tout simplement possédés. Cela crée chez les personnes qui les entourent une sorte de dégoût, d’horreur et de perte du sens de la proximité.
C’est l’humanité même des personnages qui tombe du jour au lendemain dans un gouffre d’anormalité toujours plus fort au fil du manga.

Finalement, encore plusieurs semaines après, je suis encore affecté par ma lecture de UZUMAKI et c’est ce qui me fait dire que c’est vraiment un manga qu’il faut lire. La qualité des dessins est exceptionnelle, la narration également et l’histoire est extrêmement prenante. Une exécution parfaite. Actuellement, je n’ai qu’une hâte : lire le reste de ses mangas.
bottom of page